SOYEZ

L'apparition du nom


L'origine du nom SOYEZ est multiple.

Il s'agissait à l'origine d'un nom de baptème germain, sans doute wisigot, SIGHARI. Ce prénom signifiait "armée victorieuse". Il s'est imposé au 14ème siècle comme nom de famille héréditaire et s'est décliné en SEGUIER dans le sud de la France et en SOHIER ou SOYER dans le nord et l'est, ainsi qu'en Normandie.

Le nom s'épelait alors SOYEZ ou SOHIER ; ces deux variantes relevaient uniquement de la fantaisie des scribes car leurs propriétaires, dans leur grande majorité, ne savaient pas écrire. Jusqu'à la Révolution, une même personne pouvait ainsi voir son patronyme orthographié de différentes manières, de l'acte du baptème à celui du décès.

Quant à la dernière lettre du nom, Z ou R, elle n'a jamais été significative, et n'était aucunement liée à la présence espagnole dans le Cambrésis où apparaissent les plus anciennes traces de la famille au milieu du 17ème siècle.

Origines de la famille

Le Cambrésis semble être le berceau de la famille SOYEZ. Ce nom y était présent dès le 16ème siècle. Déjà, en 1562, le premier martyr huguenot de la région fut un bourgeois de Cambrai nommé SOHIER. Sa conversion remontait à l'époque de celle de CALVIN lui même. Il fut décapité et son fils mourut sur le bûcher. A la même époque, le nom est aussi présent dans de nombreux villages situés à l'est de Cambrai : Caullery, Cagnoncles … Avesnes lez Aubert.

Au 18ème siècle, les Soyez sont présents de Cambrai à Valenciennes. Les VERMEILLE, famille des bourreaux de Cambrai, sont alliés à des SOYEZ. A Ligny, un certain Michel SOYEZ est connu comme chirurgien sur un vaisseau de corsaires. On trouve aussi ce nom à Valenciennes, du fossoyeur Pierre-Joseph SOYEZ (condamné au carcan en 1781 pour avoir enterré clandestinement des enfants sans s'être au préalable assuré qu'ils avaient été baptisés) à Ursule Dorothée Ghislaine SOHIER, ancètre de Louïse de BETTIGNIES.

Jean Soyez et Anne Marie Gambart

La plus ancienne origine certaine de la famille se situe dans un village de l'est du Cambrésis : Avesnes le Gobert (ou Avesnes lez Aubert).


Carte dressée en 1704 (Bibliothèque Nationale de France)

En 1670, Thomas SOYEZ y possède une humble maison estimée à quatre florins. Tout indique qu'il s'agit là de la souche de la famille.

Vers 1686, Jean SOYEZ épouse Anne Marie GAMBART. De leur union naissent Rémy, Philippe, Noëlle (vers 1695), Phlias, Jean (vers 1696) et Marie Antoinette (vers 1703).

Jean Soyez et Marie Barbe Gerner

L'un de leur fils, Jean, né vers 1696, épouse Marie Barbe GERNER le 16 octobre 1717. Seule Anne Marie est présente au mariage ; le père, Jean SOYEZ, est déjà décédé. Marie Barbe est, elle aussi, orpheline de sa mère, morte alors qu'elle n'était âgée que de dix ans environ. Son père, Simon GERNEZ, s'est remarié dès 1701.

Un contrat de mariage est établi à cette occasion, preuve que le couple possède quelques richesses, si modestes soient-elles … quelques boitelées et mencaudées de terres de jardinage, cent cinquante livres de tabac en feuilles ou à venir. Les époux ne savent pas signer ; ce sont des croix qui sont tracées sur l'acte de mariage.

Leurs enfants sont Pierre (v.1718), Marie Michelle (v.1724), Anne Marie (1732), Marie Thérèse (1733), Jean Nicolas (1737), Jean Pierre, Simon.

Jean et Marie Barbe meurent tous deux vers 1767. Une succession s'ouvre, mais elle n'est destinée qu'à permettre la vente d'une mencaudée de terre pour aider les deux plus jeunes enfants à survivre. La famille est alors dans la misère. Jean Nicolas n'est pas mentionné dans l'acte d'échevinage qui règle cette succession.

Nicolas Soyez et Marie Joseph Bazin

Jean Nicolas, ou plus simplement Nicolas, est né le 4 septembre 1737 à Avesnes lez Aubert.

Il se marie en 1755 avec Marie Joseph BAZIN, une jeune fille originaire de Saint Aubert, le village voisin. Là encore, un contrat de mariage est établi.

Nicolas est mulquinier et Marie Joseph fileuse ; le tissage est alors l'activité principale du village. Comme tous les mulquiniers il passait entre dix et quatorze heures par jour dans une cave obscure et humide au sol fait de terre battue ; l'humidité était indispensable à la solidité du fil.

Des heures durant, il lançait la navette pour faire sortir, après de longs jours, la fine toile de batiste ou de linon destinée à l'exportation, la grossière étoffe de chanvre ou les draps de laine. Il portait ensuite la toile au maître mulquinier qui la vérifiait, l'estampillait de sa marque et la livrait aux négociants de Cambrai qu'on surnommait "Kimberlots, boche dins l'dos" pour évoquer les ballots de tissus portés par les marchands.

De 1760 à 1777, neuf enfants naissent de Nicolas et Marie Joseph, deux garçons et sept filles. Mais un malheur survient en 1780. Marie Joseph meurt en mettant au monde un dixième enfant, un garçon qui décèdera rapidement. Le nom de famille de Marie Joseph disparaîtra des mémoires à tel point qu'un peu plus de vingt ans plus tard, à la mort de Nicolas, ses deux garçons, Jean Pierre (né en 1760) et Jean Baptiste (né en 1777), ne sauront le citer à l'officier d'état civil d'Avesnes lez Aubert.

Nicolas s'éteint quant à lui le 4 Brumaire an 13. Il habite alors chez Jean Pierre, l'ainé de ses enfants.

Jean Baptiste Soyez et Marie Marthe Vallez

Jean Baptiste est né le 29 mars 1777, dernier d'une famille de neuf enfants. Orphelin de sa mère dès l'âge de trois ans, Jean Baptiste n'apprendra pas à écrire et n'aura pour tout horizon que le dur métier de mulquinier comme la quasi totalité des habitants d'Avesnes lez Aubert. Seules les guerres le sortiront de cette torpeur.

En l'an 7, le canton d'Estourmel recense les conscrits. Il fait partie de la deuxième classe ; celle des jeunes gens âgés de 21 à 22 ans.

Seule indication physique connue : il mesure 1 m 70, taille un peu au dessus de la moyenne de celle des jeunes hommes du village.

La conscription en vigueur depuis l'an 2 envoyait les futurs soldats dans des dépôts comme celui de Douai. Ils étaient ensuite généralement dirigés vers Metz ou Dijon. Le service durait cinq ans, mais il est difficile d'affirmer que Jean Baptiste ait participé à des campagnes militaires. Il a probablement été épargné par le tirage au sort alors en vigueur.

En l'an 12, Jean Baptiste décide de prendre épouse, peut-être parce que les hommes mariés n'étaient plus mobilisables. Le 25 pluviôse, il épouse Marie Marthe VALLEZ (1776 - 1864), une fille du village voisin : Saint-Aubert. Aucun parent de Jean Baptiste n'est témoin au mariage. Cinq mois et demi après naît une première fille : Angélique ; puis un an après Jean Baptiste qui ne vivra que trois ans.

Après avoir habité rue du Marais à Saint Aubert, le couple part s'installer à Maing, un village du sud de Valenciennes en pleine croissance. Là, Jean Baptiste reprend son métier de mulquinier. Sur le cadastre de la commune est indiqué son surnom : "pioute".

Trois enfants naîtront à Maing : Toussaint (1812), Auguste (1813) et Célestin (1816). Ces prénoms ne rappellent en rien les prénoms jusqu'alors donnés tant dans la famille SOYEZ que VALLEZ, ce qui semble étayer la théorie d'une rupture de fait avec la famille restée à Avesnes lez Aubert.

Très rapidement, leurs enfants abandonnent le métier de mulquinier. Toussaint devînt cultivateur, Auguste cabaretier et Célestin scieur de long.

Jean Baptiste meurt à Maing à 68 ans, en 1845.

Célestin Soyez et Adelle Sorlen

Célestin est né à Maing le 19 juin 1816.

A l'inverse de ses frères, il ne sera ni commerçant, ni cultivateur, mais occupera simplement une activité de mulquinier puis de journalier en tant que scieur de long. Sa faible condition ne l'empêchera cependant pas d'apprendre à écrire … une grande première dans la famille.

Lors du tirage au sort des conscrits de 1836, Célestin est retenu comme " bon pour le service ". Il échappe cependant aux sept ans du service militaire car l'un de ses frères est déjà incorporé.

En janvier 1844, il épouse Marie Adelle SORLEN issue d'une très ancienne riche famille de Maing … censiers, échevins, mayeurs, chirurgiens … des notables. Les parents d'Adelle se nommaient Louis SORLEN et Isabelle DREMIERE. A la mort de sa première épouse, Louis SORLEN (1764 - 1851) trouve le réconfort auprès d'Isabelle (ou Elizabeth) DREMIERE (1780 - 1845), de seize ans sa cadette.

La famille DREMIERE, de condition plus modeste que les SORLEN, était employée par les Seigneurs du Castel des Près. Antoine, le père d'Isabelle, y oeuvrait comme cocher. En 1794, il aida la famille du Seigneur à émigrer en compagnie de deux de ses enfants (valet et fille de chambre). Porté par la municipalité sur les listes d'émigrés, il put cependant regagner ensuite Maing sans être inquiété.

De 1807 à 1818, Isabelle et Louis donnèrent le jour à cinq enfants avant de régulariser leur situation par le mariage en 1821. Marie Adelle SORLEN vit ainsi le jour le 20 décembre 1816.

Célestin a donc fait "un beau mariage" . Il n'en conservera pas moins, dans l'esprit familial, l'image d'un "joyeux drille". Un siècle plus tard, on utilisera encore dans la famille l'expression "faire le célestin" pour qualifier quelqu'un se comportant d'une façon singulière. Il a même fait deux courts séjours en prison en 1862 ; un mois à Reims en janvier pour vol puis six jours à Valenciennes en juillet pour détention d'un cheval morveux.

La nombreuse famille SOYEZ habite dans la ruelle des Près, non loin de l'Eglise. C'est là que naîtra en 1859, le dernier enfant du couple : Emile.

Célestin meurt en janvier 1879 alors qu'un froid intense s'abat sur le Valenciennois.

Emile Soyez et Adolphine Defer

Le petit dernier de Célestin et Adelle est prénommé Emile. Il est né en 1859 à Maing et s'est marié à Adolphine DEFER (ci-contre), jeune fille du village voisin : Quérénaing ; la famille DEFER a longtemps exercé à Quérénaing des fonctions municipales.

Fils d'un scieur de long, il devient quant-à lui menuisier. Hélas il reçoit un jour du vernis dans les yeux et devient aveugle. Après avoir déménagé de Maing vers Famars, il termine sa vie à La Sentinelle en 1933 affublé d'une longue barbe blanche.

Henri Soyez et Clémence Bouchez

Henri est né en 1903 à Famars.
Il accomplit son service militaire en 1924 et 1925 et entre à la Compagnie des Mines d'Anzin en 1927.
En 1929, il épouse Clémence BOUCHEZ, descendante d'une très ancienne riche famille de la région de Bapaume, ruinée lors de la Révolution.
Retraité le 1er février 1959, il meurt le 3 juin.

Arbre généalogique

Jean SOYEZ (v. 1660 - ?) - Anne Marie GAMBART (v.1660 - v.1715)
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Jean SOYEZ (v.1696 - 1766) - Marie Barbe GERNER (v.1692 - 1767)
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Nicolas SOYEZ (1737 - an 13) - Marie Joseph BAZIN (v.1737 - 1780)
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Jean Baptiste SOYEZ (1777 - 1845) - Marie Marthe VALLEZ (1776 - 1864)
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Célestin SOYEZ (1816 - 1879) - Marie Adelle SORLEN (1816 - ?)
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Emile SOYEZ (1859 - 1933) - Adolphine DEFER (1862 - 1943)
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Henri SOYEZ (1903 - 1959) - Clémence BOUCHEZ (1900 - 1979)
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Claude SOYEZ - Claude VISTICOT
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Nicole, Alain, Michel et Pascal SOYEZ
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Fabien, Cyril, Tiphaine, Emma et Flora SOYEZ


Pour terminer cette étude de la famille SOYEZ, il est remarquable de noter que les ascendants étudiés sont tous des cadets, ou en tous cas, font partie des derniers nés.

Jean est le cinquième enfant d'une famille qui en compte six. Nicolas, le sixième sur sept. Jean Baptiste, le neuvième et dernier si l'on excepte le dizième enfant qui ne vivra pas. Célestin est aussi le dernier enfant, ainsi qu'Emile (septième sur sept). Henri, lui, est le neuvième enfant sur dix. Enfin, Claude est le second des deux enfants d'Henri.

Ceci explique le faible nombre de générations pour un arbre dont les racines remontent à près de quatre siècles.

Les branches de la famille d'Adolphine DEFER remontent elles à treize générations. Son plus lointain ancètre connu est Jean MACAREZ, homme de loi à Thiant, né au début du 17ème siècle.
Clémence, l'épouse d'Henri SOYEZ, descend quant-à elle de la famille GOUBET dont les racines remontent au 15ème siècle. Cette famille était elle-même alliée aux de BAILLENCOURT dit Courcol dont certaines branches remontent à Charlemagne, Hugues Capet, Malcolm et Guillaume le Conquérant.